Sonia a essayé de se rendre au siège social, à Saint-Denis. Mais un vigile lui a expliqué qu’il ne pouvait la laisser rentrer. Elle ne fait plus partie des effectifs de SFR. Laura a tenté d’appeler des dizaines et des dizaines de fois pour tenter de joindre la cellule dite « PDV », celle qui s’occupe du titanesque plan de départs volontaires chez SFR. Elle a envoyé « quatre mails par jour » durant des semaines, « à des gens injoignables », « débordés », « dépassés ». Sonia et Laura ont quitté SFR, comme 5 000 autres salariés. Et comme nombre de ces salariés, elles ont dû faire face à une entreprise malade de la saignée qu’elle s’impose à elle-même, une sorte de hara-kiri social consistant à supprimer plus d’un tiers de ses effectifs, en l’espace de quelques mois seulement – alors qu’il était prévu que le processus s’étale sur deux ans.
Plusieurs semaines après leur départ, Sonia et Laura n’avaient toujours pas touché leurs indemnités, ni réussi à obtenir les documents légaux leur permettant de s’inscrire à Pôle emploi. Un autre ex-salarié du site de Massy nous explique qu’il a dû patienter deux mois sans aucun revenu avant que son dossier ne soit (partiellement) réglé. Pendant cette période, il a cumulé différents crédits à la consommation pour payer ses loyers et continuer à vivre. Ces cas ne sont pas isolés. Ici, un groupe privé Facebook de plus de 250 personnes et qui ne cesse de grossir, « Les coulisses du PDV », là un forum des « ex », racontent la grande pagaille du plan de départs volontaires : retards de paiement, erreurs de calcul des indemnités, radiations de la complémentaire santé, organismes de formation non payés… Pour certains, la galère dure depuis des mois. La semaine dernière, quatre ex-salariés d’un site de Marseille, où près de 400 postes ont été supprimés, étaient aux prud’hommes contre SFR pour réclamer leurs documents de départ (qu’ils ont finalement obtenus la veille de l’audience). Quinze jours plus tôt, trois autres salariés des Bouche-du-Rhône avaient déjà fait condamner l’opérateur pour les mêmes motifs. Le 13 décembre dernier, pourtant, auditionné à l’Assemblée nationale, Alain Weill, le nouveau PDG du groupe SFR, expliquait d’un ton rassurant aux députés que ce plan de départs était désormais « terminé » et qu’il s’était déroulé « dans une certaine sérénité ». Avant de nuancer par un « je ne sais pas si le terme est juste ». En effet.
Depuis des mois, les dysfonctionnements dans la mise en œuvre du plan social s’accumulent.