En 2016, lors de la campagne qui a opposé Hillary Clinton et Donald Trump, après la fin des conventions respectives des partis démocrate et républicain, les deux candidats avaient accompli 220 déplacements de campagne. Mais 205 d’entre eux ont eu lieu dans onze États seulement, les 39 autres ne recevant en tout et pour tout… que quinze visites. En 2020, à quelques jours de l’élection, la situation a encore empiré. À en juger par les statistiques compilées par l’association Fair Vote, 34 États ainsi que le district de Columbia (Washington D.C.) n’ont encore accueilli aucune manifestation des présidentiables ni de leurs colistiers. Depuis la fin août, 98 % des déplacements officiels de Joe Biden et de Donald Trump ne se sont déroulés que dans douze États. Et ce sont les mêmes qui deviennent, surtout en cette fin de campagne, l’objet d’un déferlement obsessionnel de publicités télé et radio, qui inondent les écrans et les ondes dans des proportions inimaginables en France. Selon le Wesleyan Media Project, les dépenses publicitaires totales (télé, radio et numérique) de Donald Trump et de Joe Biden
On identifie ainsi, encore une fois, ces fameux États-pivots, les « swing states », ainsi baptisés pour la première fois par le New York Times en 1936 parce qu’ils sont susceptibles de voter pour l’un ou l’autre candidat dans le système du collège électoral (lire l’épisode 25, « Trump compte sur une victoire par chaos »). Pendant très longtemps, cette notion fut purement anecdotique : en 1936, on ne la retrouvait que dans quatre articles du quotidien. Et guère plus durant les années suivantes. Pour une bonne simple et raison : entre 1924 et 1960, seuls dix États ne changèrent jamais de choix partisan à la présidentielle et, par conséquent, la liste des États-pivots s’étendait presque à l’infini. Ce n’est qu’à partir de la fin des années 1980 que les « swing states » deviennent un concept pertinent et déterminant puisqu’on note alors un rétrécissement continu du nombre d’États disputés entre les candidats des deux grands partis.