La petite citadine rouge finit sa course à contre-sens. Roues arrière contre le trottoir, airbags déployés. Une voiture de la police nationale vient de lui foncer dessus pour l’arrêter, sur le pont entre Guilherand-Granges, en Ardèche, et Valence, préfecture de la Drôme. Sonné, Gabriel Fortin en est extrait. Il ne dit rien. Il se laisse emporter dans le fourgon de Police secours qui le suivait depuis quelques minutes. Le jeudi 28 janvier 2021 au matin, le Nancéen est mis en garde à vue pour assassinats et tentative d’assassinat. C’est de ces quatre crimes qu’il répond face à la cour d’assises de Valence jusqu’au 30 juin (lire l’épisode 1, « 19 h 10, la première DRH est déclarée morte »).
Les enquêteurs ont remonté le fil de cette voiture de location rouge orangé. Récupérée à Nancy le 25 janvier 2021, elle affichait alors 10 672 km au compteur. Lorsque la police a foncé sur Gabriel Fortin trois jours plus tard, le véhicule avait roulé plus de 1 700 kilomètres. Trois fois plus que la distance qui sépare le Haut-Rhin

Gabriel Fortin avait des griefs contre d’anciennes connaissances ailleurs que dans la partie est de la France. En région parisienne, certaines personnes l’obsédaient. Si les policiers ont espéré en savoir davantage en auscultant ses relevés téléphoniques, ce fut peine perdue : Gabriel Fortin était persuadé d’avoir été mis sur écoute (lire l’épisode 2, « Gabriel Fortin, une vie de rancœur ») et, le 25 janvier 2021, il a laissé son portable chez lui, à Nancy. C’est en analysant les comptes bancaires de l’accusé et la vidéosurveillance de plusieurs stations-service que les enquêteurs ont réussi à retracer son périple. À 4 heures du matin, le 27 janvier, Gabriel Fortin a réglé son plein d’essence à une pompe de Port-Marly, dans les Yvelines. Il n’y avait aucune attache professionnelle ou personnelle. Pourtant, en 2019, Gabriel Fortin avait déjà fait un tour en Île-de-France. Une virée qui ressemble fortement à des repérages (lire l’épisode 3, « Onze ans de traque »).