De l’île d’Hœdic (Morbihan)
Un ancien de l’île nous a glissé un conseil : « Descendre la corniche comme un crapaud et remonter comme un lézard. » Il est presque plus facile d’accéder à la plage du Gaduer par la mer que par la terre. Pour participer au Gadu, cette mystérieuse fête autour d’un feu de joie en bord de mer, il faut s’éloigner à 250 mètres du bourg ou à près d’un kilomètre du camping municipal, le point de départ des expéditions festives. Suivre un sentier sablonneux bordé de calvaires, longer les falaises, en contournant l’église et le sémaphore en rénovation. Enfin, descendre une falaise haute de dix mètres en se cramponnant aux rochers. C’est là qu’elle se cache, cette fête à demi-secrète. Tout un chemin de croix pour une discothèque à ciel ouvert.
Pour les jeunes, le Gadu est la plus grande attraction d’Hœdic, ce bout de terre à 18 kilomètres des côtes du Morbihan. Entre juin et août, elle rassemble chaque samedi plusieurs ingrédients explosifs : feu, plage, musique, alcool et « folie » de la jeunesse. Ce qui, parfois, inquiète les habitants et les autorités municipales. Car récemment, des débordements ou problèmes de sécurité ont été constatés (lire l’épisode 1, « Hœdic : où sont les flammes ? »). Et l’île paisible de la baie de Quiberon refuse de devenir la cousine d’Ibiza ou de Mykonos.
Ce samedi de juin 2023 a lieu l’un des premiers Gadu de la saison. Soudain, une légère fumée blanche s’échappe d’un cratère : c’est ici. La vision est de fait volcanique. En contrebas d’une falaise, une trentaine de participants se tiennent assis autour du feu ou dansent déjà au son de Jennifer Lopez ou de classiques remixés. Au night club d’Hœdic, aucune tenue correcte n’est exigée. T-shirt crop-top ou vareuse, short ou pantalon, baskets ou pieds nus. Qu’importe.
La danse mélange des campeurs venus passer le week-end sur cette île du Ponant, des insulaires et des saisonniers, comme Lucas, qui travaille en tant que serveur à Hœdic avec une partie de sa famille. Le vingtenaire, cheveux longs, transporte l’enceinte, grosse comme un mini-frigo, sur son dos. Le Saint-Graal pour qu’un Gadu fonctionne. Les petits transistors et téléphones portables s’époumonant dans la nuit cèdent la place à du très gros son. Les baffles sont connectées en bluetooth. Étrangement, le réseau est plutôt bon, comparé aux autres parties de cette île, qui mesure 2 km2 et compte 97 habitants à l’année, jusqu’à 3 000 touristes par jour l’été.