On est arrivé en avance, place Abel-Gance, en face d’i-Télé à Boulogne, l’assemblée générale n’était pas terminée. Combien de rassemblements y a-t-il eu ici en 31 jours de grève ? On ne sait plus, mais ce qu’on sait, c’est qu’on n’en a pas manqué un. Ce matin, c’est la fin de la grève. On le savait. Depuis la veille, même. Mais tant que ce n’est pas encore voté, hein. Et peut-être qu’on refusait d’y croire. Qu’on imaginait une intervention venue d’on ne sait où, une valeureuse ministre de la Culture débarquant d’un hélicoptère pour venir à la rescousse des journalistes, un CSA qui déboule sur son cheval blanc, un président de la République qui fait donner le Raid pour déloger le forcené Bolloré.
Mais pour l’heure, il n’y a que Voltuan, armé de son maousse panneau « Une lutte digne, historique, merci à i-Télé », et Les Jours. Le décor est toujours le même, verre et béton, la tour TF1 dominant les immeubles de bureaux glacés, ascenseurs montant et descendant, indifférents. L’air est frais et humide, poreux. On s’asseoit sur le muret en face de la chaîne info. On regarde les « #je soutiensi-TELE » géants scotchés sur les vitres, et on se souvient que Serge Nedjar, le directeur, lors d’une réunion de négociation avec les salariés, leur avait dit, plein de morgue, avisant les feuilles collées : « Vous savez, moi aussi je soutiens i-Télé. » Une, parmi les multiples anecdotes navrantes qui ont émaillé ce conflit.