Dans quelques jours, autour du 6 juillet, dans la chambre du King Jason – l’hôtel où ils logent désormais –, les Jaamour fêteront l’Aïd. Bientôt un mois que le ramadan a commencé pour cette famille de réfugiés syriens coincée en Grèce, dans l’attente d’une relocalisation en Europe. Tous l’observent scrupuleusement – sauf Aram, trop petit pour jeûner –, Tammam, le fils aîné, et son père Mahmoud inclus, qui ne fument pas pendant la journée. « C’est un moment important pour nous ; mais pour la première fois, nous le ferons sans la famille, déplore Souhayr, la mère. Et sans Houmam. » Leur fils, encore mineur, est parti de Syrie avant eux et il a réussi à rejoindre l’Allemagne en décembre dernier, deux mois avant que le reste de la famille prenne la route de l’exil.

Le 6 juin, à 3 heures du matin, les Jaamour se préparent pour sohor, le premier repas du ramadan, aux accents de petit-déjeuner. Souhayr jette un œil sur la boussole du téléphone portable pour trouver la juste direction de la Mecque. Après avoir avalé, les yeux embrumés, du thé, du pain avec du yaourt, du beurre et du miel, ainsi que des œufs, chaque membre de la famille se rend à tour de rôle à la salle de bain pour les ablutions, puis sur le balcon pour la prière. La nuit peut ensuite reprendre… puis la journée, jusqu’au premier fotor, la rupture du jeûne. Le téléphone retentit : depuis Stuttgart, Houmam veut souhaiter à ses parents et à ses frères un bon ramadan. Le fils exilé Outre-Rhin jeûne aussi dans le foyer où il vit, près de Stuttgart. Dans l’hôtel King Jason, les six Jaamour affichent un air heureux, malgré des pointes d’émotion. Nous sommes vivants et nous remercions Dieu de nous permettre de faire le ramadan.
Les portables vibrent sans cesse. Le début du mois saint est aussi l’occasion d’avoir des nouvelles des proches encore en Syrie.
Pendant la journée, Mahmoud s’est activé à la préparation du dîner. Sur le balcon de la chambre, il a improvisé une cuisine en y installant un réchaud acheté quelques semaines auparavant, même si c’est interdit. Mais le ramadan, c’est une tradition, avec des plats spéciaux
. Et puis dans l’hôtel, tout le monde se fait à manger
. Les responsables du centre d’hébergement, qui s’occupent de loger les réfugiés au King Jason, ferment les yeux. À 20h45, la famille syrienne s’assoit en tailleur autour des mets disposés par terre, sur un morceau de plastique qui fait office de nappe. Plus que quelques minutes avant que l’appli installée pour l’occasion donne le