Gaziantep, envoyé spécial
La veille, en buvant un café dans la vieille ville de Gaziantep, quelqu’un m’avait présenté Jamal, Syrien réfugié en Turquie. Jamal parle couramment français, possède un petit atelier de couture où il m’affirme ne pas faire travailler d’enfants. C’est plutôt rare ici. Chassés par la guerre, les Syriens ont afflué dans la région depuis quatre ans. Cela fait flamber les loyers et baisser le coût de la main-d’œuvre. Le travail du père ne suffit plus à faire vivre la famille comme en Syrie, alors la mère travaille à la maison à casser des pistaches, coudre des perles sur des vêtements, et les enfants travaillent dans les ateliers de couture, les carrosseries automobiles, les chantiers de construction, les magasins, les champs… La plupart du temps, dans les ateliers, les patrons sont syriens. Dans les garages automobiles, sur les chantiers, dans l’agriculture, ils sont le plus souvent turcs. Il arrive que des familles, parce qu’elles n’ont pas de garçon à envoyer au travail, vendent une de leurs filles, parfois âgée de moins de 15 ans, comme deuxième ou troisième épouse d’un riche conservateur turc.
Jamal nous a proposé de nous présenter l’un de ses amis, Khider, un Syrien qui fait travailler des enfants dans son atelier d’Ünaldi, l’un des quartiers les plus pauvres de Gaziantep où vivent désormais une majorité de Syriens. Une porte en fer rouge sur le trottoir, on entre.