Avant de plonger progressivement son pays vers la dictature, Erdogan était un peu le pendant musulman d’Atatürk le laïc. Le « père » de la République turque, sultan moderne, a transformé les restes d’un empire en nation avec des méthodes autoritaires. Le président actuel, sultan conservateur, prend des poses patriarcales et a peu à peu plongé son pays dans un dangereux repli. Né dans une famille modeste et musulmane, dans un quartier très populaire d’Istanbul, il est devenu maire de la ville, l’a profondément transformée avant d’accéder au pouvoir en 2002, puis de devenir président en 2014. Conforté par l’essor de son pays, la stabilité économique retrouvée, il a progressivement éliminé les rivaux de son parti, purgé les administrations de tous ses opposants, et règne désormais en dictateur en tournant le dos aux années d’ouverture qui avaient accompagné sa prise de pouvoir. Comme Ubu, il s’est fait construire un palais gigantesque et moqué à Ankara. Comme Ubu, il est paranoïaque, imagine des mouvements
« parallèles » qui voudraient le déstabiliser. Comme Ubu, il sert surtout sa famille. Ses gendres, ses enfants et ses proches se partagent le pays, les entreprises, les médias, les marchés. Certains sont tachés depuis 2013 par des soupçons de corruption. Qu’Erdogan interprète comme des tentatives de coups d’État. Jusqu’à ce qu’un vrai putsch, raté, le 15 juillet 2016, lui donne l’occasion de briser les derniers garde-fous démocratiques, et de faire basculer son pays.
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