Un nouvel attentat a fait au moins 36 morts ce mardi soir à Istanbul, en Turquie. Cette fois, l’aéroport international Atatürk était visé ; il est en permanence extrêmement fréquenté, des avions y décollent jusque tard toutes les nuits, dès tôt le matin. Trois hommes seraient arrivés en taxi, auraient ouvert le feu, puis l’un d’eux, après avoir été touché par un tir alors qu’il courait dans l’aérogare, se serait fait exploser. Les indices pointent Daesh
, précisait cette nuit le nouveau Premier ministre, Binali Yildirim. Atatürk est pourtant devenu une forteresse. Quand on vient y prendre l’avion, le contrôle des bagages ainsi qu’une première fouille, extrêmement minutieuse, se font dès l’entrée de l’aéroport, puis une seconde fois après l’enregistrement. Partout, des centaines de policiers et d’agents de sécurité sont présents. Cela prouve qu’il est difficile d’empêcher le déroulement d’un attentat kamikaze. On peut seulement, parfois, le prévoir, le prévenir, apprendre en amont sa préparation. Mais sur ce plan, les Turcs semblent aujourd’hui complètement dépassés. Pour plusieurs raisons.
Les ressortissants américains vivant à Istanbul sont restés sagement chez eux : leur ambassade les avait prévenus du risque d’attentat extrêmement élevé ce mardi. Trois mois plus tôt, dans les jours qui avaient précédé l’attaque suicide, le 19 mars, de la rue Istiklal (quatre morts), les services allemands, extrêmement bien renseignés, avaient fermé leur lycée et averti tous leurs concitoyens qu’ils ne fallait pas sortir, situant très précisément le risque au samedi matin, jour de l’attentat (lire l’épisode 7, « Istanbul, jour d’attentat »). Les services français, eux, semblent beaucoup moins réactifs.
L’absence d’anticipation des Turcs peut paraître beaucoup plus surprenante. Elle témoigne d’une désorganisation des services, et de priorités très contestables. Jusqu’en 2013, l’AKP du président Erdogan s’appuyait, pour diriger son administration, sur les cadres formés par la confrérie musulmane Gülen, très implantés dans la justice, la police et les services de renseignements. Puis Erdogan et Fethullah Gülen se sont fâchés. La presse a alors sorti, à la fin de l’année 2013, des affaires de corruption touchant l’entourage du président turc, affaires qu’instruisaient des policiers et magistrats proches de Gülen. Une purge terrible s’en est suivie. Cela a eu pour effet de laisser la justice presque intégralement aux mains des proches de