De Grenoble
L’horreur abolit les distances. Entre le collège du Bois-d’Aulne de Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines), tout près duquel a été décapité vendredi dernier Samuel Paty, enseignant d’histoire-géographie, et le lycée Emmanuel-Mounier de Grenoble, il y a précisément 611 kilomètres. Pas la porte à côté, pas de lien particulier. Pourtant, l’équipe éducative de Mounier, où Les Jours ont leur chaise au fond de la classe depuis plus d’un an, a pris la nouvelle de cette attaque barbare comme un coup de poing dans le ventre, à l’instar de tant d’enseignants et de chefs d’établissement du pays. Ce mercredi, à partir de 19 h 30 à la Sorbonne, le président de la République Emmanuel Macron rendra un hommage national à Samuel Paty.
La fin de la classe, vendredi, n’aurait dû être que le début des vacances de Toussaint. Le prélude de deux semaines de pause bien méritée après une rentrée alambiquée par la crise sanitaire et, dans les lycées, par les nouveaux épisodes de la réforme contestée du baccalauréat (lire l’épisode 1, « Back dans le bac »). On s’en souviendra désormais comme du « 16 Octobre », énième avatar d’une logique terroriste hallucinée. Comme du jour de la naissance du hashtag #JeSuisProf, lancé en écho à #JeSuisCharlie, lettres blanches et grises sur fond noir, devenu la bannière de l’hommage populaire fait aux victimes des frères Kouachi il y a cinq ans.
Sincèrement, je me suis dit : encore une fois. Il y a déjà eu tellement d’atteintes à la laïcité… On aurait pu être à sa place, ça aurait pu arriver à n’importe qui.
Le lien est évident pour Joseph Sergi, le proviseur du lycée Mounier de Grenoble, qui a appris la mort de Samuel Paty en allumant sa télé, vendredi soir : « Sincèrement, je me suis dit : encore une fois. Il y a déjà eu tellement d’atteintes à la laïcité… On aurait pu être à sa place, ça aurait pu arriver à n’importe qui », explique-t-il au téléphone.