C’était il y a quelques semaines, juste avant les vacances de printemps, un attroupement agité à côté des toilettes de la cour : deux élèves se sont embrassés. Un événement au collège Aimé-Césaire. Ici, contrairement à pas mal d’autres collèges, il n’est pas d’usage de se rouler des pelles en public. Ni dans la cour, ni devant le collège. Trop la honte. Pas le genre. Tout juste, parfois, ai-je aperçu depuis le début de l’année une fille vaguement assise sur les genoux d’un garçon. L’air de rien, sans autres gestes, regards, confidences ou silences équivoques. Pas de bisous, pas de mains dans les mains. Les fricotages vont se cacher ailleurs, sur les bancs des deux parcs publics qui jouxtent les voies ferrées en contrebas du collège. Là où ne traînent ni les adultes du collège, ni les parents, ni les voisins.
Avec la musique qu’ils écoutent, c’est normal. Ils écoutent des trucs où ils ne font qu’insulter les femmes et nous répètent sans cesse les paroles.
Le flirt s’exprime surtout sous d’autres formes et d’autres codes. Où il est assez peu question de tendresse affichée. On se cherche à coup de chiquettes et de mini-courses-poursuites dans la cour et les couloirs. On appelle sa copine « ma go ». Pour se dire qu’ils s’aiment, ils s’en mettent une
, résume Arthur, l’un des surveillants du collège. Nos enfants ne se parlent pas, ils se tirent les cheveux
, analyse le principal. Jean-Louis Terrana a le sentiment amer que les filles, dans ce collège, sont assez déconsidérées par les garçons. Elles subissent beaucoup leur violence, plus qu’ailleurs
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