Deux rues et 600 mètres seulement séparent le ministère du Travail de l’Assemblée nationale. Une aubaine pour Antoine Foucher, qui navigue de l’un à l’autre depuis le 10 juillet. Rue de Grenelle, le conseiller de la ministre Muriel Pénicaud reçoit les syndicats pour un nouveau round de consultations sur la future réforme du Code du travail, que le gouvernement entend faire passer par ordonnances. Au Palais-Bourbon, il est « au banc », selon l’expression consacrée. Assis derrière sa ministre, en bas de l’hémicycle, il pilote le rejet ou l’acceptation des amendements déposés par les députés sur la loi d’habilitation. L’ancien cadre du Medef, chargé des relations avec les syndicats, est aujourd’hui le directeur de cabinet de la ministre du Travail.
Sa nomination, après quatre années passées au sein du syndicat patronal, n’a pas scandalisé les syndicats, qu’il connaît bien. Entre 2011 et 2012, il était conseiller chargé du marché du travail, déjà rue de Grenelle, au cabinet de Xavier Bertrand cette fois. Sa mission aujourd’hui : éviter que la réforme version Macron ne débouche sur un vaste mouvement social, comme lors des débats sur la loi El Khomri il y a un an. À 36 ans, Antoine Foucher a été placé au cœur du dispositif concocté par l’exécutif pour mener le dialogue social. Les consultations sont pilotées au ministère du Travail. Il reçoit les syndicats en personne, parfois accompagné de la directrice de cabinet adjointe, Claire Scotton.
Ordonnances obligent, le texte de la réforme ne sera pas débattu par les députés comme dans un processus législatif normal. C’est entre les conseillers et les syndicats que des évolutions peuvent être négociées – les discussions se poursuivront jusque fin août. Ce qui renforce le rôle stratégique des cabinets. À côté de celui du ministère du Travail, les conseillers de Matignon et de l’Élysée s’affairent aussi. Rue de Grenelle, les syndicats ont le sentiment que se joue une partition en forme de faux-semblant. À chaque entrevue, les membres du cabinet organisent un tour de table et prennent des notes. Mais « tout reste très flou », note Michel Beaugas, négociateur de Force ouvrière (FO). Le ministère du Travail se garde bien de toute parole définitive. « Quand le cabinet de Muriel Pénicaud nous donne une information ou des précisions, il ajoute tout de suite que rien n’est tranché », explique Fabrice Angei, négociateur pour la CGT.

Qui prendra les décisions sur le texte final des ordonnances ? Ô surprise, les centrales syndicales sont persuadées que les arbitrages viendront in fine de l’Élysée.