L’évocation du mot suffit à donner des sueurs aux femmes de l’État islamique. Maqqar. Toutes redoutent cette étape. Toutes ou presque doivent y transiter durant leur séjour. Pour une durée variable. Lena et Safya ont vécu l’expérience, l’une quelques heures à peine, l’autre de longs mois. « En partant, je me suis dit : on va me protéger, je vais être tellement importante, parce que voilà, on nous voit un peu comme des perles, on est des femmes, donc on doit être protégées. Et en fait pas du tout, vraiment pas du tout », concède Lena. Ces maisons de femmes ont été installées dans chacune des villes contrôlées par l’EI. Il s’agit d’immeubles de plusieurs étages. Une centaine de femmes en moyenne y sont entassées. Une vie de promiscuité, d’insalubrité et d’arbitraire. Un passage obligé pour toutes celles qui perdent la tutelle de leur mari : les plus nombreuses sont les veuves – le taux de mortalité des jihadistes français est d’un sur cinq –, les divorcées et les nouvelles arrivantes de l’étranger qui y séjournent brièvement, le temps qu’un homme vienne les réceptionner. Il n’y a qu’un seul moyen de quitter le maqqar : le mariage. Mais encore faut-il, pour celles qui ont perdu leur mari, respecter le délai de viduité de quatre mois et dix jours. Un délai parfois insupportable, en raison des conditions de vie éprouvantes.
Toutes les conditions sont réunies pour nous faire craquer pour qu’on épouse quelqu’un.
Pour quitter le maqqar, certaines ont préféré tenter le suicide ou la fuite.