Tout comme la mort rapide, la prison constitue un des éléments du cursus honorum de tout jihadiste. « Certaines personnes, ils disent que c’est une ni’ama, un bienfait, explique Zoubeir, lui-même passé par la prison en France à son retour de Syrie. C’est le régime qui les emprisonne et ils détestent le taghut [dans la tradition musulmane, « taghut » correspond aux idoles, tout ce qui est « adoré » en dehors de Dieu. Dans la bouche des jihadistes, le terme renvoie à toute autorité étatique ou ennemie, par nature « idolâtre », car procédant d’une autre autorité que celle de Dieu, ndlr]. Pour eux, il les emprisonne pourquoi ? Parce qu’ils disent la vérité. Soit ils sont tués, soit ils sont enfermés. Donc en restant encore plus dedans, ça va les déterminer encore plus. Ils auront encore plus la haine contre ce qu’ils appellent le “taghut”. »
La plupart des grands idéologues du mouvement dans le monde sont passés par la détention. De nombreuses organisations jihadistes sont nées dans les prisons. C’est le cas d’Ansar al Charia, dont les chefs en Tunisie ont pensé leur projet dans les cellules de Ben Ali avant de bénéficier d’une amnistie générale au lendemain de la révolution de 2011. C’est le cas également de l’actuel État islamique, dont une bonne partie de l’état-major, à commencer par son émir al Bagdadi, était dans les prisons américaines en Irak, comme Abu Graïb ou Camp Bucca. Dans la prison de Sednaya en Syrie séjournait avant la révolution Abu Loqman al Sury, actuel