De Mayotte
«Maore Rihimi ! » Les mains tournées vers le ciel, une vingtaine de femmes réunies à l’entrée du centre de soins de Dzoumogné, dans le nord de Mayotte, invoquent l’aide de Dieu pour mener leur action. « On est sur un blocage total de l’hôpital. On fait des exceptions avec les urgences. Mais pour les consultations, c’est nada ! », explique Sandie Faoulati, une mère de famille qui fait figure de leader au milieu de l’assemblée. Elle insiste : « Ce blocage est valable sur tout le territoire de Mayotte. » Dans toutes les communes du 101e département français, des actions similaires sont en effet menées pour perturber l’accès aux soins. Initiée début mai, cette mobilisation s’inscrit dans un contexte de bras de fer avec les Comores qui prend sa source dans le lancement de l’opération Wuambushu décidée par le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin et enlisée depuis (lire l’épisode précédent). Une opération qui est l’objet de manifestations de soutien organisées par le Collectif des citoyens de Mayotte 2018, organisation dont est issue Sandie Faoulati et une partie de ses camarades.
Pour ces Mahoraises en colère, l’objectif de la mobilisation est d’abord d’interpeller le gouvernement comorien, « mais aussi celui de la France », insiste Sandie Faoulati. « La France est une puissance mondiale. Vous n’allez pas me dire qu’elle est incapable de stopper Azali [Azali Assoumani, le président des Comores], ce nimbus corrompu jusqu’à la moelle épinière. Il réclame notre île et nous envoie sa population pour profiter des aides sociales et nous remplacer. »
Lorsqu’on part en guerre, il y a toujours des dégâts collatéraux.
Loin de ces préoccupations géopolitiques, la souffrance est palpable pour ceux qui tentent d’accéder à leur rendez-vous. « J’ai une fracture ouverte. On a dû me faire une greffe d’os. Je sens ma jambe gonfler sous le plâtre. Regarde mon frère, lui c’est sa prothèse qui lui fait mal. Je dois aller à mon rendez-vous, mais l’hôpital est bloqué. C’est pas normal d’en arriver là », déplore un homme de 35 ans assis devant les grilles du centre hospitalier de Mayotte.
Depuis presque trois semaines que l’intervention Wuambushu a commencé, aucun sans-papiers comorien n’a encore été expulsé. Malgré d’âpres négociations, le petit pays insulaire n’est toujours pas revenu sur son refus d’accepter les expulsés de Mayotte. Dans ce contexte, impossible pour Sandie Faoulati et ses