Les jours d’inauguration, il y a beaucoup de monde à remercier. Et quand on est Jeff Koons, auteur d’une sculpture censée être un hommage à la ville de Paris et qui a été financée par des mécènes privés, la liste est vraiment longue (lire l’épisode 9, « Les tulipes, un cadeau à la Koons »). Mais l’homme est un artiste – et un businessman – professionnel. Le jour où son Bouquet of Tulips a été présenté au public, le 4 octobre dernier, il a bien fait les choses. Il a cité (attention, cela va être long) : Anne Hidalgo, son adjoint à la culture Christophe Girard, les services de la ville de Paris, Jane Hartley – l’ex-ambassadrice américaine à l’origine de l’idée de cadeau à la France –, les membres de son studio de création, sa femme, ses enfants, Arnold AG – le fabricant allemand de sa sculpture –, ses seize mécènes, ses agents parisiens Jérôme et Emmanuelle de Noirmont. Enfin, il a aussi eu un mot pour Anne-Sylvie Schneider et Anne-Céline Delvert, du Fonds pour Paris, qui « ont permis, grâce à leur dévouement depuis la présentation du projet en novembre 2016, de réunir les donations ».
Ce jour-là, pas grand monde n’a fait attention à ces deux femmes. Ni ne s’est interrogé sur l’existence de ce Fonds pour Paris. Les médias avaient beaucoup trop de monde à aller interroger : Jeff Koons lui-même, la maire de Paris, les people venus assister à cet événement mondain (pensez, il y avait Alain Minc, Nikos Aliagas, Charlélie Couture) ainsi que des personnalités du monde du marché de l’art. Pourtant, cet objet étrange mérite toute notre attention. Structure de droit privé, indépendante de la municipalité mais qui s’est mise à son service dans cette histoire de bouquet de tulipes, le Fonds pour Paris préfigure-t-il une nouvelle façon de financer des projets publics, de la part de collectivités qui voient baisser les dotations de l’État ?
Anne Hidalgo, Jeff Koons et Jane D. Hartley, ex-ambassadrice des États-Unis d’Amérique en France, lors de l’inauguration du « Bouquet of Tulips » à Paris, le 4 octobre 2019
— Photo Romuald Meigneux/Sipa.
L’idée du Fonds pour Paris remonte à l’élection municipale de 2014. Avec un programme dépensier et craignant de – trop – alourdir les impôts locaux, Anne Hidalgo veut multiplier les financements dits « innovants ». En la matière, la maire de Paris n’a pas de tabou, comme le montreront les énormes bâches de publicité apposées sur des édifices publics en rénovation (comme le théâtre du Châtelet) ou le « naming » du palais omnisports de Paris-Bercy, renommé AccorHotels Arena.