Toutes les victimes violentées de crimes impunis, ces corps de femmes meurtris, incendiés, lardés de coups de couteau, tous ces visages d’enfants disparus qui sourient sur les photos, tous les plus scandaleux mystères du pays tiennent sur du papier. Dans les bureaux de l’Office central pour la répression des violences aux personnes (OCRVP), à Nanterre, des flics et gendarmes un peu spéciaux lisent et relisent les procès-verbaux d’anciennes procédures qui ont documenté froidement toutes ces horreurs. Ils les analysent, les trient, les mettent en fiches informatiques et/ou dans des petites chemises de couleur, les malaxent dans des ordinateurs pour tenter d’en extraire une piste ou, mieux, un nom. Retirer de la circulation les auteurs de ces abominations, c’est un peu plus qu’un boulot d’enquêteur ordinaire, parce que ces criminels-là (statistiquement, ce sont presque exclusivement des hommes) sont passés à travers les gouttes. Imaginer qu’ils prennent peut-être du bon temps, des années ou des décennies après avoir commis ça, élèvent des enfants, savourent leur retraite ou continuent à violer et à tuer, ça vous mettrait dans un état d’esprit de moine-soldat de l’enquête criminelle. « Moine copiste », rectifie, rieur, Franck Dannerolle, 46 ans, patron de l’OCRVP depuis 2022, en regardant un de ses enquêteurs s’user les yeux sur des documents. « Ici, c’est comme ça qu’il faut d’abord bosser. » Après, il faudra retourner sur le terrain.
Le service créé en 2006, autour notamment du thème judiciaire des disparitions, a progressivement monté en puissance au fil de l’importance prise par le sujet des « cold cases » et il ambitionne de devenir le service de référence.