Quand la « police des polices » a contacté Aymen I. pour l’inviter dans ses locaux, le 3 juillet dernier, il a d’abord pris peur. Déjà condamné et interdit de territoire français, ce sans-papiers égyptien de 39 ans a eu du mal à croire que l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) voulait l’auditionner en tant que victime. C’était pourtant bien le cas et ce, dans l’enquête pour corruption et trafic de drogue – dévoilée par Les Jours – dans laquelle cinq policiers de la BAC du XVIIIe arrondissement de Paris et deux autres hommes ont été mis en examen en juin dernier (lire l’épisode 2, « BAC du XVIIIe : trois nouveaux policiers mis en examen »). Les fonctionnaires sont notamment soupçonnés de « faux en écriture publique », c’est-à-dire d’avoir bidonné des procès-verbaux. L’IGPN réexamine aujourd’hui leur travail, à la lumière de cas litigieux. Celui d’Aymen I. en est un particulièrement saisissant, que Les Jours révèlent.
En avril 2017, l’Égyptien est interpellé par Karim M., dit « Bylka », et Aaron B., les deux « baqueux » du XVIIIe aujourd’hui poursuivis pour les charges les plus lourdes. Ces policiers l’accusent d’avoir transporté dans sa voiture un sac contenant 35 grammes de cocaïne. L’homme a toujours juré que la drogue ne lui appartenait pas, comme en attestent ses déclarations à la brigade des stups en 2017, consultées par Les Jours. Il soutient que la cocaïne a dû être déposée dans sa voiture. La thèse de la machination ne convainc personne et joue sans doute contre lui. Aymen I. est condamné, incarcéré et expulsé vers l’Égypte à sa sortie de prison. Deux ans plus tard, sa version est finalement prise au sérieux par la police. Joseph Hazan, son avocat, annonce son intention de se constituer partie civile « en raison des conséquences démesurées » de cette affaire pour son client. Il espère, à terme, obtenir « la révision d’un jugement basé sur un procès-verbal frauduleux ».

Sans-papiers inconnu des services de police en 2017, Aymen I. passait sous le radar et bossait dans le bâtiment grâce à de faux papiers. Sa plus grosse erreur a probablement été de s’acoquiner avec Ahmad M., un Pakistanais que l’IGPN qualifie d’« escroc notoire ». Celui-ci est désormais mis en examen et incarcéré dans l’affaire de la BAC, pour corruption active sur un fonctionnaire de police