Avec sa grande table ronde, la salle pourrait accueillir les discussions passionnées de dizaines de livreurs mais comme chaque semaine, elle est vide. Nous sommes à la Maison des habitants du centre-ville de Grenoble. Le mardi après-midi, la municipalité réserve une pièce pour les livreurs des plateformes. Ici, on l’appelle la « salle de repos ». Gabriel Zoltan, livreur Uber Eats et Deliveroo, a bien essayé de motiver ses collègues à venir. Sur le groupe WhatsApp qu’il a créé, il a envoyé plusieurs notes vocales accompagnées d’un petit clip tourné avec ses nouveaux camarades de la CGT, à laquelle il vient d’adhérer. Dans le fil, un livreur a répondu : « Félicitations les gars, une vidéo bien réalisée ! » Gabriel est déterminé à poursuivre la lutte, mais comment faire lorsqu’on est seul ? « Quand je fais des notes vocales pour présenter la CGT, les livreurs me disent bravo, mais quand j’essaye d’organiser des rencontres, personne ne vient. Comment tu veux créer un groupe dans ces conditions ? Est-ce que c’est parce qu’ils aiment pas la CGT ? Mais si c’est ça, il faut qu’ils me le disent, j’aimerais savoir ! »
Faire émerger la lutte des classes dans un secteur composé de livreurs indépendants et précaires, la tâche est rude.