«Air France a 80 ans et c’est du jamais-vu ! » Karim Taïbi, élu FO au CCE, ne décolère pas. La semaine passée, la direction a sanctionné 618 pistards de jours de mise à pied pour avoir utilisé leur « droit de retrait ». Les pistards se sont spontanément mis à « débrayer », une à deux heures par jour, à l’annonce de la mise en sous-traitance d’une partie de leur activité en février dernier. « Le voilà, le renouvellement du dialogue social depuis le 5 octobre (le jour des chemises déchirées, ndlr)… », résume le syndicaliste.
Les « pistards », les « rampants », les « gilets jaunes »… Ces surnoms désignent les gars qui travaillent « sous l’avion ». « Les gars », car c’est un métier d’homme, il n’y a pas de femme sur la piste. Les voyageurs ne les voient pas, ou de loin, derrière une vitre de salle d’embarquement ou depuis un hublot. Les pistards réalisent ce qu’on appelle la « touchée », le chargement-déchargement des bagages et des conteneurs en un temps chronométré. Quand il y a du vent arrière, il arrive que du kérosène non brûlé sorte des réacteurs d’un avion et soit vaporisé dans l’air. C’est comme boire un grand verre de gasoil
, résume Philippe Adnot, pistard et syndicaliste. Lui s’est fait retirer les amygdales un an et demi à peine après avoir débuté dans le métier. Ce fut le seul remède efficace contre ses angines chroniques liées à ces inhalations.
Philippe Adnot a les cheveux gris et un visage à la fois jovial et fatigué.