Sur la table, les documents s’accumulent. Des lettres, des témoignages, des comptes-rendus médicaux. Des preuves de vie qui viennent justifier que Lee, 50 ans, est bien qui elle prétend : une femme trans, mariée, mère de deux enfants et heureuse (lire l’épisode 2, « “Pour la première fois de ma vie, je me sens vraiment moi” »). « Enfin là, ils ne vont pas juger de mon bonheur, mais plutôt de si je rentre dans les cases », lâche-t-elle dans un rire. Pour son changement d’état civil, Lee a aussi dû récolter l’approbation de sa femme, Claire, et de leurs deux enfants. « Tout est fait pour nous compliquer la vie, souligne Claire, 48 ans. Notre plus grand garçon, Logan, a dû faire une lettre pour expliquer que cela ne lui posait aucun problème et pour Kyrian, comme il n’a que 9 ans, j’ai dû rédiger une lettre à son nom. On demande à des enfants de témoigner en faveur de leur parent, c’est un non-sens. »
Si la parentalité trans est peu pensée en France, c’est aussi parce qu’elle était très difficile d’accès avant 2016. La loi de modernisation de la justice, portée par Christiane Taubira, a retiré l’obligation de stérilisation pour accéder à son changement d’état civil, mais les discriminations perdurent (lire l’épisode 1, « “J’étais au tribunal pour défendre ma vie” »). Une violence que beaucoup de personnes trans n’ont pas oubliée. « À l’époque, nous n’avions pas le choix, se remémore Axel Léotard, 53 ans, militant et auteur de l’ouvrage Transidentités, une histoire volée.