Fierté, grande fierté aux Jours : notre journaliste Camille Polloni a reçu vendredi l’un des prix « éthiques » remis chaque année par l’association Anticor qui lutte contre la corruption et se porte partie civile dans de nombreuses affaires confiées au pôle financier. C’est d’ailleurs l’enquête À la poursuite de l’argent sale, qui vaut à Camille Polloni d’être ainsi distinguée par Anticor.
Dans cette obsession démarrée en septembre 2017 et enrichie de 40 épisodes depuis, Camille Polloni colle aux basques des procureurs, juges d’instruction et policiers spécialisés, dont la particularité est de voir chaque scandale leur passer entre les mains, de Jacques Chirac à François Fillon, d’Elf aux ventes de sous-marins. En remettant ce prix, représenté par un buste de Marianne, Anticor a également distingué le « Magouillotron », l’application conçue par Camille Polloni avec le journaliste Yann Guégan, qui permet de comprendre les affaires traitées par la justice financière et de se repérer dans leur souvent lent et complexe déroulement. Vendredi encore, Camille Polloni mettait à jour le Magouillotron, déjà lourd de 60 affaires, avec ce nouveau développement : le Parquet national financier requiert le renvoi en correctionnelle de François et Penelope Fillon dans l’affaire de l’emploi présumé fictif de l’épouse de l’ancien Premier ministre. Recevant son prix, Camille Polloni a remercié tous les protagonistes de son obsession, « presque tous présumés innocents : Patrick Balkany, Jean-Luc Mélenchon, Marine Le Pen, Alexis Kohler, Richard Ferrand, Michel Mercier, Marielle de Sarnez, Thomas Thévenoud, Serge Dassault, Vincent Bolloré, les familles Bongo, Obiang, NGuesso, etc. Les yeux dans les yeux, je vous le dis : sans eux, rien n’aurait été possible ».
Fierté donc pour Les Jours que le travail remarquable de Camille Polloni soit ainsi distingué. Fierté aussi pour le modèle éditorial des Jours qui permet, par son système de séries et d’épisodes, de faire des enquêtes au long cours et ainsi de mettre à jour le travail de la justice financière et de faire des révélations. Depuis bientôt trois ans, l’équipe des Jours travaille d’arrache-pied pour que ce modèle puisse exister et perdurer. Vous lisez ici un article gratuit, mais le journalisme de qualité coûte cher et nous avons besoin d’abonnés pour qu’il se poursuive. Nous sommes un jeune média, pas encore à l’équilibre, qui se situe autour de 15 000 abonnés ; nous avons aujourd’hui près de 11 000. Alors soutenez-nous : abonnez-vous et, si vous l’êtes déjà (bravo !), faites-nous connaître, partagez nos articles, parrainez vos amis. Vous pouvez aussi faire un don aux Jours (défiscalisé à 66 %, c’est légal, la justice financière ne vous tombera pas dessus !) sur la plateforme J’aime l’info.
Au cours de la cérémonie d’Anticor – où par le passé ont notamment été distingués les journalistes Fabrice Arfi (Mediapart), Élise Lucet (pour Cash Investigation sur France 2) ou encore le lanceur d’alerte Antoine Deltour dans l’affaire de l’évasion fiscale LuxLeaks), d’autres prix ont été remis. À la journaliste de Mediapart Martine Orange, qui a notamment dévoilé le conflit d’intérêts touchant le secrétaire général de l’Élysée Alexis Kohler. Au lanceur d’alerte Karim Ben Ali, intérimaire pour ArcelorMittal, qui a refusé de déverser des déchets toxiques dans la nature et l’a fait savoir. À une étudiante, Sophie Lemaître, pour sa thèse sur les flux financiers illicites. À David Brugioni et Séverin Medori, deux maires de communes corses, Centuri et Linguizzetta, qui refusent la corruption locale, souvent au prix de menaces et de violences. Ainsi qu’à l’économiste Julia Cagé pour son livre Le prix de la démocratie (Fayard, 2018), qui dénonce le financement de la vie politique française et lance plusieurs propositions. Une autre connaissance des Jours que Julia Cagé puisqu’elle est également présidente de la Société des amis des Jours, dont elle suit l’évolution depuis l’époque où notre média n’étaient qu’un projet sur un canapé, du temps où Les Jours n’étaient encore qu’une idée sur le papier.
Une belle soirée que celle d’Anticor pour Les Jours, donc, d’autant qu’un autre vieil ami a été distingué : Vincent Bolloré. Qui n’a pas reçu de prix « éthique », vous vous en doutez, mais une casserole. L’association remet en effet chaque année de symboliques casseroles. Vincent Bolloré, héros de notre obsession L’empire, a été primé vendredi pour les « poursuites-bâillons » qu’il déclenche à tout va en justice contre les médias qui osent enquêter sur lui. Dans cette catégorie particulièrement courue de la casserole, deux députés La République en marche ont eu droit à leur récompense – qu’ils ne sont pas venus chercher – : Raphaël Gauvain, rapporteur de la loi sur le secret des affaires qui musèle les médias, et Yaël Braun-Pivet, pour avoir « saboté » la commission d’enquête sur l’affaire Benalla qu’elle présidait à l’Assemblée nationale.
Un ultime prix, inédit, a été remis : la pantoufle. Sa première récipiendaire est l’ancienne ministre Fleur Pellerin, en récompense de sa reconversion du public au privé vertement critiquée par la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) : elle a rejoint un fonds d’investissement lié à un groupe avec lequel elle avait tissé des liens du temps où elle était ministre de François Hollande.