Ce n’est un secret pour personne : dans certains quartiers, police et délinquants s’écharpent. Parfois, les uns passent dans le camp des autres. Rarement, les forces de l’ordre sont poursuivies pour avoir commis, elles aussi, des infractions. Quand elles passent devant la justice, c’est souvent grâce aux images récupérées par les médias, filmées par des témoins, à l’insu des auteurs. Les Jours n’ont pas rencontré, dans ces mois de voyage à travers les tribunaux français, de policiers présentés en comparution immédiate. Cela ne doit pas arriver souvent tant les dossiers qui les impliquent sont entourés d’une pression intense, et les derniers exemples de violences policières médiatisées l’ont magistralement montré. Mais les policiers peuplent les dossiers de CI, sans aucun doute. Et leur implication n’est parfois pas aussi claire que leurs procès verbaux laissent à penser. Le 9 mai, à Bobigny (Seine-Saint-Denis), on l’a compris très vite. L’avocate d’Adama S. a annoncé presque d’emblée : « Une plainte IGPN a été déposée. »
En 2020, 5 420 signalements ont été faits sur la plateforme de la police nationale. Cela a donné lieu à l’ouverture de 1 101 enquêtes judiciaires. 48,5 % d’entre elles concernaient des violences. En fin de course, « dix-neuf fonctionnaires de police ont fait l’objet de poursuites judiciaires en 2020 », indique le rapport de l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) Quatre ont été mis en examen pour violences, quatorze ont été renvoyés devant le tribunal correctionnel. Six avaient été condamnés en 2020, un relaxé, quand sept attendaient encore leur jugement.

Dans le cas d’Adama, son avocate est déjà désabusée. D’autant que le cas de son client n’inspire pas la confiance absolue. Le trentenaire bien connu de la justice comparaît pour des faits particulièrement mal vus par l’opinion publique. Le 19 février, en pleine rue, un passant le surprend à donner des coups de poing à son chien. Il appelle la police face à l’énervement manifeste d’Adama. Les forces de l’ordre le trouvent en compagnie de deux toutous apeurés. « J’ai giflé le mâle parce qu’il avait mangé ses excréments », explique Adama au tribunal. Mais les animaux sont prostrés dans le coffre de la voiture, couverts de blessures. « C’est parce qu’ils se sont battus avec d’autres », tentent de justifier le propriétaire.
Contre toute attente