Dans certains tribunaux, on court après le temps. On s’attend à quitter la salle d’audience alors que le reste de la ville est déjà au lit. On voit l’huissier tendre des dossiers cartonnés au président sans que leur pile ne s’amenuise. Sous les lumières artificielles, on oublie l’heure du jour (ou de la nuit). Le tribunal d’Annecy n’est pas de ces palais-là.
Le mardi 10 mai, alors que frappent les premières températures estivales de l’année sur la ville des Alpes, pas d’audience. Pas de comparution immédiate (CI), non plus de correctionnelle simple, ni d’assises. Le tribunal est vide. Le lendemain, Les Jours s’enthousiasment à la vue de l’inscription des CI au planning : « Salle B
Le rythme judiciaire annécien étonnerait plus d’un habitué de la justice du quotidien, où l’on tente de rattraper les heures. L’un des meilleurs exemples de cette course de fond se trouve en Seine-Saint-Denis. Quand la Haute-Savoie compte trois tribunaux judiciaires (TJ) pour près de 830 000 habitants, le département francilien n’a que l’instance située à Bobigny pour prendre en charge 1,6 million de personnes. Dans le palais de justice en briques accessible par un dédale d’escaliers bien cachés, les audiences de compas ont lieu tous les jours de la semaine. Elles débutent en général à 13 heures, mais aucun moyen de savoir à quelle heure le tribunal clôturera l’audience. Si beaucoup de juridictions surchargées de dossiers sont dans ce cas, Bobigny détient le record. Il n’est pas rare que certaines audiences se terminent au beau milieu de la nuit, à 4 ou 5 heures du matin. Des « audiences Paris-Tokyo », comme les surnomme Ludovic Friat, vice-président du tribunal de Bobigny.

À Annecy, le fuseau horaire reste bien ancré en France. Certainement le résultat de plusieurs facteurs.