Payer 2 000 euros le litre une crème qui réduit la profondeur des rides d’un millième de millimètre… Étonnant, et pourtant, la Rénergie Multi-Lift de Lancôme à 100 euros les 50 ml est distribuée partout. Lancôme ne cherche même pas à prouver l’efficacité de son cosmétique au moyen d’une quelconque étude scientifique. La marque se contente d’affirmer que son « soin réparateur » a un « effet lifting ». Il « raffermit la peau » et « réduit les signes de fatigue ». Pensée magique ? En partie. Mais c’est le contraire qui serait surprenant : les consommateurs sont rationnels seulement dans les manuels d’économie. Et encore, pas dans les manuels récents.
Ce qui rend le marché des cosmétiques captivant est que la pensée magique finit par y produire des résultats bien concrets. En matière de beauté, il y a bien entendu des « trucs » qui marchent, tout simplement. Un maquillage qui améliore la symétrie du visage, par exemple, est un atout de séduction (de multiples études ont montré que l’œil humain était sensible à la symétrie). Mais il y aussi l’autoconviction, une sorte d’effet placebo de la beauté. Il vient renforcer l’effet objectivement ténu des cosmétiques, en donnant plus d’assurance, voire d’éclat, à ceux et celles qui sont maquillés. Jusqu’où le fait de se croire beau peut-il rendre séduisant ?
Et jusqu’où le fait de lire qu’on est belle aide-t-il à le croire ? En enchaînant les pieux mensonges sur les crèmes de leurs annonceurs, les magazines féminins (lire l’épisode 2, « Le tuto du maquillage de l’info ») trompent seulement des dupes volontaires.