Quand Les Jours font la connaissance de Bingtao Chen en mars 2020, la France vient d’entamer son premier confinement et lui sort à peine du sien (lire l’épisode 22 d’En quarantaine, « Je reviens de Wuhan »). Ce Chinois de 30 ans qui vit et travaille en France était parti en janvier 2020 rendre visite à sa famille dans une ville près de Wuhan, pour le Nouvel An, comme il le fait chaque année. Deux jours après, il se retrouve en confinement très strict chez ses parents. Il ne peut en sortir que deux mois plus tard… pour retomber dans un autre confinement, en France. Les Jours avaient alors attrapé Bingtao quasiment à sa descente d’avion et recueilli son témoignage rare du confinement à Wuhan, d’où est partie la pandémie, témoignage qui est devenu un livre, Wuhan confidentiel (Flammarion, 2020). Un confinement ultracontrôlé par des membres du parti, avec livraison de repas à domicile, une unique autorisation de sortie par foyer tous les trois jours… À l’époque, le confinement à la française qu’il qualifiait de « doux » le faisait bien rigoler. Et aujourd’hui ?
On vous avait laissé tout juste revenu de Wuhan, que vous est-il arrivé depuis ?
J’ai eu le Covid, il y a à peu près deux mois. Pas vraiment une forme très grave, j’ai eu quelques jours de fièvre et deux semaines d’arrêt de travail. Quand même, au bout d’une semaine, j’ai eu des problèmes de respiration. Je ne suis pas allé aux urgences, mais pendant trois jours j’ai respiré à 80 % de ma capacité.
Quelle ironie, avoir tant de mal à revenir de Wuhan pour attraper le Covid en France…
Exactement ! Je me suis fait rattraper par le Covid !
Dans le métro parisien, il n’y a aucun contrôle, aucune limite du genre dix personnes par wagon. Et un mètre entre les personnes sur la ligne 13, c’est juste n’importe quoi.
Vous savez comment vous l’avez attrapé ?
Sur la ligne 13 (une des lignes de métro les plus encombrées de Paris, ndlr) ! À ce moment-là, j’étais obligé de me rendre physiquement au travail trois jours par semaine, et comme personne n’a eu le Covid là-bas et que je ne l’ai transmis à personne, je soupçonne fortement la ligne 13. C’est le problème, on vous dit : « Il faut garder les distances » mais dans le métro, il n’y a aucun contrôle, aucune limite du genre dix personnes par wagon. Et un mètre entre les personnes sur la ligne 13, c’est juste n’importe quoi, les gens sont entassés les uns contre les autres. On laisse les gens s’autogérer ; et quand on laisse les gens s’autogérer, il n’y a rien qui est géré.
Comment l’avez-vous annoncé à vos parents en Chine, eux qui, en mars, étaient inquiets de vous voir repartir en France, à cause du Covid justement ?
Au moment où je suis parti de Chine, c’était la fin de l’épidémie là-bas et en France elle venait de commencer.