Tim Burgess est un musicien britannique qui s’est fait connaître au début des années 1990 comme le chanteur des Charlatans avant de se lancer en solo et d’enchaîner les collaborations à travers la pop actuelle. Cet hyperactif s’est vite ennuyé pendant le confinement des mois de mars et avril. Il a donc lancé une idée simple sur Twitter : la « Tim’s Twitter Listening Party », des « sessions d’écoute » collectives quotidiennes où un album – de Pulp, Elliott Smith, MGMT ou Joy Division – est décrypté et raconté par l’un de ses auteurs, un proche ou un fan. C’était l’un des rendez-vous musicaux à suivre tout au long de cette parenthèse suspendue, mais pendant ce temps, Tim Burgess en profitait pour discuter avec les autres artistes et faisait ses comptes. Car pour lui comme pour tous les musiciens à travers le monde, l’arrêt des concerts et des festivals jusqu’à nouvel ordre est une catastrophe (lire l’épisode 58 de la série En quarantaine). « C’est frustrant, parce que j’adore jouer, mais surtout on voit que ces revenus vont nous manquer, explique le Britannique. Quand les ventes de disques ont été remplacées par le streaming, on nous a dit qu’il n’y aurait pas beaucoup d’argent mais qu’il nous restait le live. On a foncé en se disant : “Au moins, on a ça.” Et là, tout cela a disparu aussi. » Perdre ces revenus des concerts, c’est perdre ses cachets versés par les salles bien sûr, mais aussi des droits d’auteur liés à la représentation publique qui ne seront pas distribués l’an prochain. À la fin, c’est un manque à gagner de plusieurs milliers d’euros pour un petit artiste, qui se compte en dizaines de milliers chez les plus en vue. La perte de ces revenus révèle à nouveau, pour Tim Burgess et d’autres musiciens qui l’ont rejoint au fil des semaines, les failles du streaming, cette écoute en ligne – sur abonnement ou en échange de quelques publicités – qui n’a pas encore prouvé qu’elle pouvait rémunérer tous les artistes à la juste valeur de leur musique. C’est sur cette grande inquiétude pour l’avenir des musiciens qu’est née la campagne #BrokenRecord, qui se répand en ce moment sur les réseaux sociaux outre-Manche et rejoint une autre initiative, Fix Streaming Now, lancée par The Ivors Academy, l’association historique de défense des auteurs, compositeurs et interprètes en Grande-Bretagne. Petit à petit, ça commence à ressembler à une révolte qui n’a fait que grandir ces dernières années et trouve dans la crise du coronavirus une urgence nouvelle autant qu’une opportunité médiatique.