De Grenoble
«“Fruit cuit, fruit cru”, allez, on le prononce en boucle ! » Debout en cercle, neuf élèves essaient tant bien que mal de répéter rapidement la courte allitération. Difficile de ne pas écorcher les mots, le résultat est une polyphonie un rien bégayante. Jeudi à 17 h 30, ce petit groupe de terminale du lycée Emmanuel-Mounier de Grenoble, d’où Les Jours scrutent ce qu’il reste de la réforme du bac, assistent à la deuxième des trois séances de préparation du grand oral que l’équipe pédagogique a prévues pour eux. Elle a lieu au CDI, sous la houlette de Ludovic Lecordier, formateur en communication. Également comédien et spécialiste de l’impro, il fait face à huit filles et un garçon
Pourtant, le dénouement approche : l’établissement a prévu un grand oral blanc le 4 juin et l’épreuve nationale aura, elle, lieu du 21 juin au 2 juillet. Dernière rescapée du nouveau bac Blanquer, elle comptera pour 10 % de la note finale à l’examen (lire l’épisode 8, « Baccalauréat : l’oral dans les chaussettes »). Les protestations des enseignants et des lycéens n’ont pas réussi à la faire annuler. À Mounier, le vent de révolte a vite tourné court : le lundi 10 mai, les élèves sont parvenus à bloquer le lycée pour la journée ; le lendemain, ils ont tenu un barrage filtrant. Mais le mercredi 12 mai, la police y est allée au gaz lacrymo dès 8 heures « pour libérer l’entrée de l’établissement », selon Le Dauphiné libéré.
Ultime fétiche du bilan politique de Jean-Michel Blanquer, l’épreuve aura lieu quoi qu’il en soit, à en croire le ministre de l’Éducation nationale : « Si on a créé cet exercice, c’est précisément parce que cette compétence est fondamentale, savoir argumenter, savoir écouter, être capable de parler tout simplement », a-t-il expliqué le 5 mai au 20 heures de France 2. Sa seule concession, des aménagements à la marge. En même temps que les deux questions problématisées qu’ils ont (plus ou moins) travaillées durant l’année dans les deux enseignements de spécialité conservés en terminale, les candidats pourront présenter à leur jury un document certifiant les points de programme qui n’ont pas pu être étudiés. Pour le premier volet de l’épreuve, l’exposé, qui devait à l’origine se faire sans notes à l’issue d’un temps de préparation de vingt minutes, les élèves auront finalement le droit de conserver leur brouillon sous les yeux lors de leur passage.