On est toujours sans nouvelles du vote d’Antoine Genton. Dans le premier épisode des Électeurs, le panel sensible des Jours, il affirmait ne pas vouloir dire pour qui il allait voter à la prochaine présidentielle, ne pas avoir à prendre parti, à donner son opinion, à cause du métier qu’il exerce. Antoine Genton est journaliste. À i-Télé, qu’il a quittée au mois de décembre, comme la quasi-totalité de la rédaction, à l’issue de trente-et-un jours de grève. Depuis qu’il s’est éloigné d’une i-Télé dévastée, il travaille sur des projets d’émissions, de magazines.
Ce qui est sûr, c’est que ce n’est pas dans la primaire de droite qu’on retrouvera le vote d’Antoine Genton. Ni dans celle de gauche, d’ailleurs. Pendant la première, il était en grève ; pendant la deuxième, en vacances. Mais ce n’est pas la vraie raison : « J’ai du mal à avoir confiance dans les partis politiques pour ne pas réutiliser les fichiers. » Que ses données ne soient pas privées et que son nom apparaisse. Prudent. Et puis, quand on vote à la primaire, « on signe un engagement » ; surtout, « on finance un parti ». Alors non.
Peut-être que les journalistes sont de droite, finalement.
Le spectacle de ses désormais anciens collègues ou voisins éditorialistes de plateau tout colère de la victoire du « rêveur » Hamon sur le « crédible » Valls (lire l’épisode 10 des Grands primaire de gauche) l’amuse. « Peut-être que les journalistes sont de droite, finalement », ironise Antoine Genton, que ce poncif d’une profession entièrement rangée à gauche irrite bien comme il faut : « C’est une vraie connerie. » Les journalistes de droite existent, Antoine Genton les a rencontrés.
« Ce qui m’inquiète, c’est les discours simplistes. » Qu’ils s’appliquent aux journalistes ou que ce soit les journalistes qui les appliquent. Et ils ne s’en privent pas sur les plateaux télé. Sur lesquels, avec le recul qui est aujourd’hui le sien, Antoine Genton porte un regard distancié. « Il y a souvent une défiance vis-à-vis de la complexité. » Autant dire que la petite phrase de David Pujadas évacuant, lors du duel de l’entre-deux-tours entre Valls et Hamon, la question de l’état d’urgence d’un lapidaire « c’est un débat technique » (lire l’épisode 8 des Grands primaire de gauche) ne lui a pas beaucoup plu. « Oui, c’est un débat technique ! Oui, c’est complexe ! », s’agace-t-il.
Aux éditorialistes, ces girouettes de plateaux télé égarées par le résultat inattendu de la primaire – de droite, de gauche –, par l’affaire Fillon, sachant qu’il faut être du côté du manche, mais ne sachant plus où est le manche, à ceux endossant les habits de com des politiques, reprenant sans filtre leurs mots, Les Mots inutiles chantés par Gainsbourg, « usés jusqu’à la corde », Antoine Genton oppose justement une vigilance au langage. « Je te parle de mon expérience de présentateur. J’ai une vision un peu froide et parcellaire », reconnaît celui qui n’a jamais, en tant que journaliste, suivi d’équipe politique sur le terrain, mais précisément, « quand on est présentateur, il faut faire attention aux mots », dit-il.