À Bamako (Mali)
Assis sur son tapis à faire le thé, le vieil homme ne décoche pas un sourire et jette des regards répétés sur le téléphone satellitaire posé à côté. On est en octobre 2022 à Bamako. Onze personnes, des civils, ont été tuées la veille par les fantassins de l’État islamique dans les brousses de Tessit, dans le nord du Mali. Une histoire de représailles, dit Alassane, qui coordonne les évacuations à distance. Il est conseiller communal d’un village, rural et martyr, qui n’a pas choisi d’être au cœur des combats entre tous les acteurs du conflit de la région. Combattants d’Al-Qaïda, de l’État islamique, de groupes armés ex-rebelles s’y affrontent pour le contrôle d’un territoire stratégique, pour l’influence… et pour l’or.
« Ça ne s’arrêtera jamais, jusqu’à la mort de la dernière personne dans le Gourma, ils continueront leur guerre. À quoi ça sert de combattre pour une parcelle où il n’y a plus personne ? », demande-t-il, las d’un conflit qui dure depuis plus de dix ans et dont personne ne voit la fin. Il ressert un thé, triture son téléphone : il attend des nouvelles. Et fait le récit, à la manière d’un mauvais conte, du nord du Mali. « Tout a commencé en 2012. Il y avait des rebelles, il y avait l’armée ; les premiers ont décidé leur indépendance », dit-il. L’État fantasmé s’appelle Azawad.