L’image est sombre, très pixellisée. Un homme, crâne rasé ou presque. Un bouc brun. Un T-shirt à manches courtes noir, peut-être gris. Un léger rictus de joie. Il tient un chat dans une seule main. Voilà la bribe de vie en Syrie que Samy Amimour laissait voir à sa famille sur internet. La réalité de son quotidien sur le territoire de l’État islamique (EI) n’est alors pourtant pas celle d’un amoureux des félins. Jour après jour, l’ex-chauffeur de bus de la RATP originaire de Drancy, en Seine-Saint-Denis, accomplit sa tâche de soldat. Chaque pas le mène droit dans la fosse du Bataclan (lire l’épisode 2, « 13 novembre 2015, si longue est la nuit »). Tout comme ceux d’Ismaël Omar Mostefaï et Foued Mohamed-Aggad. Depuis 2013, comme l’ont établi les enquêteurs de la DGSI (direction générale de la sécurité intérieure) devant la cour d’assises spéciale de Paris, les destins des trois hommes sont intimement liés.
Samy Amimour et Ismaël Omar Mostefaï rejoignent la Syrie le même jour. Dans la même voiture. Ils ne sont pas amis de longue date. Le renseignement français a aujourd’hui encore du mal à comprendre exactement ce qui les lie. Peut-être leur passion pour le forum jihadiste Ansar Al-Haqq, ou bien une connaissance radicalisée commune. Pour partir en Syrie sans affoler leurs proches et la police, ils ont inventé une histoire. Pour la famille Amimour, Samy est parti trois semaines en vacances dans le Sud avec des copains.