L’avocate générale, Anne-Laure Sandretto, ne voulait laisser aucune place au doute. « À aucun moment et pour aucune victime, Jacques Rançon n’est arrivé et a dit : “J’ai besoin de satisfaire ma conscience. Il y en a eu d’autres.” À chaque fois, il se trompe, il oublie de dire des choses, il ment… » Le 12 juin dernier, aux assises de la Somme, à Amiens, le sexagénaire a été condamné pour le meurtre et le viol d’Isabelle Mesnage, commis en 1986 (lire l’épisode 4, « Rançon : trente ans à l’ombre et un doute »). Il se dit innocent et a fait appel du verdict, mais cette condamnation pourrait soulever de nouveaux pans de son parcours criminel. Didier Seban, l’avocat de la famille Mesnage, lui avait d’ailleurs promis à la fin du procès : « On se reverra. »
Un élément a été évoqué à plusieurs reprises par les parties lors des audiences. Sur la scène de crime (lire l’épisode 3, « Isabelle Mesnage, la désoubliée »), à quelques mètres du corps à moitié dénudé et mutilé d’Isabelle Mesnage, les enquêteurs ont trouvé un bâton. 80 centimètres de mystère. « L’une des extrémités était effritée et, sur plusieurs centimètres, le bâton était couvert d’une substance marron, sûrement du sang », a rapporté un ancien gendarme lors du procès. Aucune analyse n’a été menée sur cet indice. En 1986, les techniques de police scientifique ne sont pas encore au point : passer au crible le bâton revient à le détruire. En 2018, les scellés ont disparu, le bâton et la vérité avec.
« Même si c’était l’époque de Cro-Magnon, comme on laisse à penser, on aurait pu faire des analyses biologiques, a cependant martelé Xavier Capelet, l’un des avocats de Jacques Rançon. Le problème dans cette enquête, c’est qu’on est parti de la fin pour arriver au début. On est parti de l’intuition que Jacques Rançon était coupable. » Ce bâton intrigue en effet davantage que sa présence est éludée.