Depuis le début du procès, il trépignait d’impatience. Tour à tour agité sur son siège ou arpentant la salle d’audience nerveusement, il distillait ses petites phrases pendant les (longues) suspensions. « C’est une histoire de fou », disait-il volontiers aux abords des bancs de la presse, assurant aussi : « Je veux que toute la vérité soit faite dans cette affaire. » Politique et prévenu, avocat de formation, Nicolas Sarkozy soignait sa com avant de plaider sa cause : ce lundi 7 décembre, il était interrogé à la barre du tribunal correctionnel de Paris où il comparaît pour « corruption » et « trafic d’influence ». Passant du registre solennel et indigné au ton quasi-clownesque, mimiques à l’appui, l’ancien président de la République s’est employé à répondre à toutes les questions – alors que son avocat, Thierry Herzog, a refusé de répondre sur les écoutes et que le haut magistrat Gilbert Azibert a largement éludé (lire l’épisode 4, « Au procès Bismuth, des esquives bien parallèles »).
Avant de venir à la barre, Nicolas Sarkozy a échappé à la diffusion de cinq écoutes pendant l’audience, demandée par le ministère public – cinq conversations remontant à février 2014 et attestant, selon l’accusation, du pacte de corruption noué entre les trois prévenus. Le scellé a été ouvert, la greffière s’est plongée dans le CD à la recherche du bon fichier et a tenté de lancer le lecteur, en vain. Déception dans la salle. « Ça me semble assez compliqué… », a commenté la présidente, d’autant qu’il ne fallait diffuser que les passages retranscrits dans l’enquête. « Au vu de la difficulté, je pense qu’on va renoncer », a tranché rapidement Christine Mée, qui a entrepris une nouvelle lecture à voix haute des conversations entre Nicolas Sarkozy et son avocat (lire l’épisode 3, « La défense de Sarkozy brouille l’écoute »). Sans les intonations originales et tout ce qu’elles peuvent traduire lors d’échanges téléphoniques : hésitations, craintes, complicités ou amusements… Dans une de ces conversations, on entend notamment Nicolas Sarkozy dire : « Appelle-le aujourd’hui en disant que je m’en occuperai, parce que moi, je vais à Monaco et je verrai le prince », lorsque Thierry Herzog évoque un « coup de pouce » pour appuyer Gilbert Azibert qui lorgne sur un poste à Monaco.
Nicolas Sarkozy au tribunal de Paris, le 2 décembre 2020
— Photos Alain Guilhot pour Les Jours.
Restée inaudible dans les écoutes, la voix de Nicolas Sarkozy résonne fort dans la salle d’audience. D’abord pour se défendre vigoureusement de tout ce dont on l’accuse.