Derrière le gigantesque parking du parc olympique où s’agitent délégations et journalistes, les derniers habitants de Vila Autódromo, favela initialement vouée à la destruction, sont dans les cartons. Après des années de lutte, ils ont finalement reçu les clés de leurs maisons vendredi 29 juillet, avec « seulement » une petite semaine de retard par rapport au délai prévu dans l’accord signé avec le maire de Rio, Eduardo Paes (lire l’épisode 2, « Les résistants de la favela »). À deux jours de la cérémonie d’ouverture, la dernière des vingt familles est en train d’emménager, tandis que les autres tentent de mettre de l’ordre dans leurs affaires. Leur ancienne favela ressemble maintenant à un lotissement quelconque, construit autour d’une rue goudronnée à la va-vite où de petites maisons égales en tout point se succèdent. Les plus chanceux disposent d’un arbre qui a résisté aux destructions, puis à la reconstruction.
Après toutes ces années de lutte, on veut quelque chose de décent, pas trois briques montées à la va-vite.
Un mois plus tôt, sur le chemin de terre qui séparait l’église en construction des conteneurs où les résidents ont habité provisoirement, Dona Penha et son amie Iranice tapent le bout de gras. À droite du chemin, les murs des maisons qu’elles vont habiter ont surgi ; à gauche, seul un canal plein de détritus les sépare de la route qui mène au parc olympique. Elles font ce trajet plusieurs fois par jour, pourtant Dona Penha alerte son amie : Attention à ce bout de fer !
Les armatures métalliques dépassent aux quatre coins de ce qu’il reste de la favela. Elles sont apparues au fur et à mesure de la destruction et il y en a maintenant partout. Ce bout de fer appartenait à la maison de Maria, tu te souviens ?
demande Dona Penha, vaguement nostalgique. Ce sont les seuls souvenirs qui nous restent.
Des souvenirs douloureux qui n’empêchent pas Iranice de conclure : Oui, mais on a gagné. C’est ça le plus incroyable.

Ils sont comme ça, les habitants restés à la favela, marqués par des années d’une lutte harassante mais heureux et fiers comme des coqs de l’avoir emporté. Dona Penha et Iranice arrivent à l’église pile à l’heure pour le délicieux (bien qu’un peu trop sucré) gâteau de fubá (farine de maïs) et le café. La réunion avec l’architecte chargé de construire leurs maisons vient de commencer. Au milieu de la dizaine de personnes présentes,