On pourrait l’appeler le « pic bidoche », à l’instar du « pic pétrolier ». Soit le moment où un pays ou une civilisation atteint l’apogée de sa production et de sa consommation de viande, avant que celles-ci ne se mettent irrémédiablement à diminuer. Ce pic, la France l’a atteint en 1998. Après un demi-siècle de hausse continue, la conso moyenne de viande par Français s’est bloquée cette année-là à 94 kg équivalent carcasse. Depuis, ce chiffre a baissé, pour atteindre 86 kg en 2015. En cause : un pouvoir d’achat en berne, le prix de la viande qui augmente (+ 21 % sur les dix dernières années), mais surtout l’évolution de notre manière de manger. Nous sommes ainsi plus attentifs aux questions de santé liées à une alimentation trop riche. On consomme également davantage de charcuterie et de plats transformés, moins de morceaux bruts à cuisiner (lire l’épisode 8, « La bidoche, moche et méchante »). Au final, le volume avalé est moindre.
Le succès de la pensée antispéciste, le souci du bien-être animal ou les préoccupations écologiques grandissantes autour de l’élevage ont-ils un poids dans cette baisse de la consommation de viande ? Il n’existe aucune étude fiable sur le sujet en France, où le phénomène semble historiquement plus marginal que dans nombre de pays voisins. En mai dernier, le Guardian assurait que le nombre de vegans avait augmenté de 350 % en Grande-Bretagne ces dix dernières années, pour atteindre un demi-million de personnes.