Ce mardi, Yasmina Kettal a troqué sa tenue d’infirmière contre un jean slim et un t-shirt noir du collectif Inter-Urgences, en vente pour 10 euros à l’entrée de la bourse du travail de Saint-Denis. La deuxième AG nationale du collectif Inter-Urgences se tient là, à deux kilomètres de l’hôpital Delafontaine (Seine-Saint-Denis), à partir de midi. Yasmina est arrivée tôt. Membre de SUD Santé, l’infirmière s’investit à fond dans la mobilisation depuis un trimestre. Ses vacances ont été studieuses. Entre deux sollicitations de journalistes qui font leurs directs sur le parking, elle navigue de groupe en groupe pour régler les derniers détails, vérifie qu’il reste du café, distribue des torches fumigènes.
Car à midi pile, le collectif offre aux caméras un de ces happenings macabres dont il a le secret : pour symboliser la crise des urgences, des soignants s’allongent par terre, dans des housses mortuaires noires, tandis que d’autres brandissent des torches rouges. Ailleurs en France, ils ont posé avec des sacs en plastique sur la tête pour dénoncer leur « asphyxie ». Abandonnons pour une fois les urgences de Saint-Denis, le couloir vert et le couloir bleu, la zone de déchocage et les clopes fumées face aux camions de pompiers. Les paramédicaux engagés dans la grève lancée en mars doivent décider quoi faire, après les annonces de la ministre de la Santé.
Lundi, Agnès Buzyn a promis de consacrer 750 millions d’euros à « des solutions pérennes, restructurantes, qui vont régler le problème des urgences sur le long terme ». Bullshit, répondent les grévistes, jurant de leur côté de poursuivre le mouvement. Ils espèrent désormais l’élargir à d’autres services et appellent les médecins à les rejoindre, pour obtenir ce qu’ils demandent depuis le début : 300 euros de plus sur la fiche de paie, 10 000 embauches aux urgences, l’arrêt des fermetures de lits à l’hôpital public. Si la prochaine journée d’action « Inter-Urgences » est prévue le 26 septembre, avec des rassemblements locaux, les hospitaliers se laissent la possibilité de rejoindre d’autres rendez-vous d’ici là.
Le problème de base, c’est que la fréquentation des urgences augmente alors que le nombre de lits d’aval diminue. Tant qu’on résoudra pas le problème de l’aval, on ne réglera pas la crise des urgences.
Plus que sept médecins sur vingt-six aux urgences de Mulhouse (ainsi que le relevait Mediapart), « des urgences qui ferment à 22 heures faute de médecins » en Provence-Alpes-Côte-d’Azur, des Smur à l’arrêt, des paramédicaux en grève depuis des mois et toujours insatisfaits : Agnès Buzyn a beau essayer d’éteindre le feu, ici on l’accuse plutôt d’avoir soufflé sur les braises.