«Au moment de #MeToo, j’ai entendu une salariée harcelée sexuellement raconter son histoire à la radio. Elle expliquait : “L’inspection du travail m’a dit qu’elle ne pouvait rien faire pour moi.” Si on est passés à côté de ça, on ne remplit pas notre mission. » L’amertume est palpable. Comme plusieurs autres de ses collègues que Les Jours ont rencontrées, Sophie Poulet, inspectrice du travail et secrétaire nationale du syndicat SUD, regrette que l’institution qu’elle représente ne soit « pas forcément repérée comme un acteur-clé » dans les enquêtes sur des situations de harcèlement et ne soit pas plus sollicitée sur le sujet.
Les gens ne se présentent pas spontanément comme victimes de violences sexistes ou sexuelles, c’est pour ça que nous devons être vigilants.
Pourquoi ? « Souvent, ce genre de cas se termine par une démission ou une rupture conventionnelle. Parfois suivie d’un combat aux prud’hommes pour la requalification en licenciement. C’est une réaction classique de partir d’abord et d’attaquer ensuite », éclaire la syndicaliste. Pourtant, l’institution dispose de vraies possibilités d’enquête : entrer dans l’entreprise, entendre les employés, réclamer des documents, vérifier si l’employeur a initié, avant la plainte, des opérations de prévention sur les violences sexuelles… « Certaines victimes veulent seulement témoigner de leur situation, mais sans qu’on puisse donner suite », précise Alexandra. Domitille, inspectrice du travail depuis une dizaine d’années, rebondit : « Recevoir la victime, l’écouter, c’est différent de dresser un procès verbal. Si les violences sexuelles sont avérées, on peut rédiger un PV, mais la plupart de nos contrôles n’en arrivent pas là, on envoie plutôt des lettres d’observation ou des rappels à l’ordre. » Concernant les cas de viol ou d’agression sexuelle, l’inspection, qui doit agir dans la cadre édicté par le Code du travail, effectue un signalement au procureur de la République, par le biais de l’article 40 du Code de procédure pénale qui oblige un fonctionnaire à dénoncer tout délit à la justice.

Dans l’Ouest de la France, Myriam se trouve justement confrontée à cette situation. Liée par l’obligation de réserve l’empêchant de dévoiler les détails d’une affaire en cours, elle accepte tout de même de nous raconter sa façon de travailler sur ce dossier. Tout démarre l’été dernier, lorsqu’une employée de la grande distribution vient se renseigner auprès de l’inspection du travail. Son patron lui a refusé une rupture conventionnelle, quelles sont ses options pour quitter son entreprise ? L’agent de renseignement en droit du travail qui reçoit la salariée