La pluie a failli tout gâcher. Ceux qui n’habitaient pas trop loin ont changé de chaussettes entre la fin de la manif et le début de la « Nuit Debout » place de la République, à Paris, les autres sont venus directement, glacés mais joyeux.
La moitié de la place s’est transformée en campement festif, moins douillet qu’une ZAD, plus meublé qu’un début d’occupation façon Indignés. Un camion déplié fait office de scène de concert, un écran géant doit projeter Merci patron, le film de François Ruffin sur Bernard Arnault. Il y a même une tente infirmerie. L’économiste Frédéric Lordon, en passe d’incarner le Bourdieu du mouvement contre la loi travail.
Un peu à l’écart, une fille et deux garçons ont accroché un brassard « Nuit Debout » à leur coude. Ils font partie de la commission « accueil et sérénité » (version locale et soft du service d’ordre) et résument en quelques mots l’objet du rassemblement : On en avait marre de rentrer chez nous après les manifs. On s’est dit : profitons-en pour faire se rencontrer les gens en lutte dans différents secteurs.
Les motifs d’insatisfaction se sont catalysés entre eux. Eux sont intermittents et chômeurs, en pleine renégociation des accords Unédic. Le 23 février dernier, ils se sont retrouvés à la Bourse du travail pour une soirée de discussions qui, articulée à la sortie du film de François Ruffin et au mouvement naissant contre la loi travail, a débouché sur cette soirée.