Les nouvelles normes européennes sur les émissions de CO2 vont se durcir. Et les rentables mastodontes se transformer en boulets pour les constructeurs.
Sur le parking de Toyota France, à Vaucresson, dans la banlieue ouest de Paris, il y a beaucoup de SUV. Une majorité de SUV d’ailleurs. Des gros, des très gros, des énormes. Des RAV4, des CH-R, des Land Cruiser et même un Hilux, le pick-up maison. La seule différence avec les autres constructeurs, c’est qu’à part ces deux derniers monstres, qui émettent respectivement 194 et 170 g de CO2 par kilomètre parcouru, les SUV de la maison japonaise sont vendus en motorisation hybride – électrique et essence. C’est probablement en raison de cette avance prise sur l’une des technologies qui peuvent permettre à l’industrie automobile de basculer dans un nouveau siècle de basses émissions que Toyota a été le seul des grands constructeurs présents en France à accepter de me recevoir.
Car le groupe japonais peut légitimement faire le malin : la moyenne actuelle des émissions de l’ensemble de ses véhicules – sous les marques Toyota et Lexus – est de quelque 111 g par kilomètre aujourd’hui. Ils sont donc en bonne voie pour entrer dans les exigences européennes prévues pour l’année 2021, soit 95 g/km en moyenne pour l’ensemble des constructeurs. La marque Toyota est même déjà « à 98 g, explique Sébastien Grellier, le directeur des produits pour la France. Nous sommes le seul constructeur à avoir des émissions en baisse en 2018 grâce à l’expansion de nos ventes [électrifiées]. On a mis dix ans à vendre notre premier million de véhicules hybrides, mais aujourd’hui ça s’accélère, c’est un million en huit ou neuf mois ! » La grande majorité des autres marques européennes ne peuvent pas en dire autant, elles qui ont retardé au maximum le moment où il faudrait se confronter à un nouveau siècle de l’automobile. Pire, à un nouveau siècle de la mobilité (lire l’épisode 3, « SUV, l’aberration écologique »).
En cas de dépassement, chaque gramme en trop coûtera 95 euros au groupe automobile concerné
— Photo Sébastien Dondain pour Les Jours.
En octobre 2007, c’est le Parlement européen qui a fait bouger les choses en votant une résolution qui demandait la création d’« objectifs annuels contraignants » pour les émissions de gaz à effet de serre. Le principal objectif de ce texte était qu’« à compter du 1er janvier 2020, les émissions moyennes [des voitures neuves] ne dépassent pas 95 g de CO2 par kilomètre ». Ce texte enfin décidé était l’aboutissement de longues années de tergiversations sur le volet transport des objectifs européens en matière de limitation des émissions nocives.